Voici ma traduction de la réplique de Douglas Wilson à Kevin DeYoung. L’article original se trouve ici.
Cet article de Kevin DeYoung a lancé une conversation nationale. J’étais en train de terminer mes articles du No Quarter November lorsqu’il l’a publié. Ma réponse s’est donc fait attendre jusqu’à aujourd’hui. J’ai eu suffisamment de temps pour tweeter ce que je pensais que la critique de Kevin, une critique responsable de la part d’un homme raisonnable. J’ai aussi demandé à tous ceux qui se considèrent comme étant « de mon bord » de lui répondre judicieusement, dans le même esprit.
D’après ce que j’ai pu voir, c’est quelque chose qu’ils ont fait en grande partie – mais cela ne veut pas dire que les réponses n’étaient pas ciblées, révélatrices et énergiques. Je vais essayer de faire pareil. Je remercie Kevin pour cette opportunité et j’ai hâte de le rencontrer grâce à tout cela.
Cette réponse est comme une énorme bête, mais que voulez-vous?
En guerre contre toutes ces conneries
Ci-dessous, vous trouverez la dernière annonce promotionnelle pour Canon+. Après l’avoir regardé, vous vous demanderez peut-être si nous avons précipité sa production au cours de la semaine dernière afin de répondre à l’article de Kevin sur le Moscow Mood. Mais non, c’était déjà en préparation, et cela résume bien notre approche. Nous sommes en guerre contre toutes ces conneries et nous sommes prêts à utiliser des mots comme ça lorsque c’est pertinent.
Voici la vidéo. (En anglais seulement, mais vous pouvez activer la traduction automatique).
Venez pour l’ambiance, restez pour la substance
Kevin affirme que certaines personnes sont attirées à Moscow par l’ambiance, et que les préoccupations doctrinales ne sont pas vraiment une priorité. Je rencontre beaucoup de personnes attirées par Moscow, et des phrases sur le thème « Pourquoi je suis venu à Moscow », j’en ai entendu de toutes sortes. On pourrait jouer le jeu de la rhétorique avec ce j’ai entendu, par exemple « Venez pour le côté pratique des enseignements, restez pour l’ambiance », ou « venez pour être près de vos petits-enfants, restez pour les trucs postmill », ou « venez pour la communauté, sans même comprendre l’ambiance », « venez pour une éducation classique, restez pour le culte », et ainsi de suite. En d’autres mots, la thèse de Kevin ne représente qu’une petite partie de ce qui se passe ici, elle ne constitue en aucun cas la totalité. Ce qu’il dit est vrai, dans une certaine mesure, mais la mesure n’est pas très grande, et il se passe beaucoup plus de choses. Le mot que j’entends le plus, c’est le mot communauté. Cette communauté nous a été donnée, comme une bénédiction que nous ne méritions pas. Ce don est quelque chose que l’apôtre Paul aurait appelé koinonia.
Donc, venez pour l’ambiance, restez pour la substance. Venez pour une raison quelconque et restez pour la seule raison qui compte.
Tout cela n’était que l’ombre des choses à venir : la réalité est en Christ.
Colossiens 2.17 (Semeur)
Un petit résumé
L’article de Kevin a suscité de nombreuses réponses, provenant d’un peu partout, et j’ai apprécié une grande partie de ce qui a été dit. Joe Rigney a fait un travail merveilleux dans The American Reformer ici, Toby Sumpter a répondu ici et Jared Longshore ici. C’est un honneur d’être associé à ces hommes. En voici un, et un autre, et encore un autre. Quelques mots ont également été un réel encouragement. Et voici la réponse de quelqu’un qui était en visite à Moscow il y a quelques semaines à peine. Et Tom Buck, qui n’est pas un grand fan de la rhétorique moscovite, a souligné ici une incohérence flagrante. Et Michael Foster a fait un travail précieux en soulignant qu’on a tous une ambiance, un mood, et que nous devrions peut-être avoir une discussion à ce sujet. Brian Brown sait quelle heure il est, William Wolfe aussi. Ce dernier a su appliquer les sages conseils de John Piper à l’ensemble de la situation.
Dans une autre perspective, Justin Taylor a fait la promotion de l’article de Kevin sur X et a lui-même renforcé certains de ses points. Il a également recommandé cet article. Même si j’apprécie les raisons proposées pour expliquer mon comportement, il me semble qu’on essaie de contrôler les dégâts après coup, par le moyen d’une psychanalyse faite à distance, totalement sans fondement.
Ce qui se passe, selon moi, c’est qu’on essaie de trouver la meilleure façon de prendre ses distances avec moi sans trop que ça paraisse, puisque la gauche est aux aguets. Anthony Bradley s’est plaint ouvertement du fait que j’ai travaillé dans le passé avec Desiring God, The Gospel Coalition, etc. Pour qu’ils n’aient pas l’air de céder à la pression, ils diront que c’est moi qui ai changé. Pour expliquer la tournure sombre que mon esprit a prise ces dernières années, ils affirmeront que c’est Rachel Held Evans « qui m’a fait tomber ». Permettez-moi simplement de dire que si j’ai beaucoup interagi avec Rachel Held Evans, c’est parce qu’elle propageait une influence dommageable dans l’Église, ce qui n’aurait pas dû se produire, et aussi parce qu’il était vraiment facile de lui répondre. Est-ce qu’elle m’avait mise dans sa poche? Pas vraiment.
Ayant donc écarté mes jim-jams-diagnostiqués-à distance, entrons dans le vif du sujet.
Les bons coups de Kevin
Kevin a critiqué notre projet, et je dois dire qu’il a été bien plus efficace que les critiques habituels, qui semblent souvent accompagnées d’un cas de rage avancée. Kevin est un vrai critique, pas simplement quelqu’un souffrant du Syndrome de Dérangement Moscow. Par contre, je pense que ses attaques ont manqué la cible, et de loin! J’expliquerai pourquoi au cours de cet article. Au moins, ce sont de véritables critiques, contrairement à ceux qui ne font qu’extérioriser leurs frustrations. Kevin a pris soin de bien faire les choses, et je l’en remercie.
Je pourrais mentionner bien d’autres critiques, mais ce qui rend la sienne plus efficace, c’est le fait que Kevin est prêt à donner du crédit là où crédit est dû. Il ne nous attaque pas parce que nous sommes des sociopathes, des orcs, des Klingons ou des défenseurs de pédophiles. Il reconnait qu’il y a quelque chose de véritablement attrayant dans ce que nous faisons, et que cela est attrayant pour les chrétiens raisonnables. En même temps, il pense qu’il y a anguille sous roche, et il tient clairement à en avertir ces chrétiens raisonnables. Il est convaincu que quelque chose ne va pas au-delà de toutes les bonnes choses.
Il voit les bonnes choses, et il est prêt à en parler.
Wilson a aidé beaucoup de chrétien que je connais… Wilson doit être félicité pour avoir établi un écosystème… Il faut reconnaître qu’il n’a pas eu peur de prendre des positions impopulaires… Il offre au monde et à l’Église un christianisme sensé, musclé et direct à une époque de compromis et de défection. En plus de cela, Wilson a une famille qui l’aime et qui aime Christ… l’esthétique culturelle et la posture politique que Wilson incarne si habilement…
KDY, l’article en question (TAIQ)
Novembre est terminé, je m’empresse donc de répondre. Lorsque je dis que Kevin est un critique de qualité, ce n’est pas simplement parce qu’il a dit des choses élogieuses à mon sujet. Tant que je reçois un peu de flatterie, je serais d’une manière ou d’une autre prêt à flatter en retour? Non ce n’est pas ça.
Je dis simplement, en tant que personne connaissant les rouages de la rhétorique, que les critiques de ce genre nous sont très utiles. Toute personne raisonnable ayant passé du temps ici à Moscow, ou possédant un minimum de connaissance à notre sujet, a vu les remarquables et nombreuses bénédictions qui y prennent forme. Kevin le voit, et il est prêt à le dire. Ça signifie qu’il n’est pas aveugle. On devrait toujours pouvoir profiter de critiques qui ne sont pas aveugles.
Et en même temps, ses inquiétudes ne sont pas anodines. Elles sont importantes et doivent être prises au sérieux et traitées de manière approfondie. C’est ce que j’ai l’intention de faire ici.
Cela fait quarante ans maintenant que je réponds à ces questions sur le mood ou le « ton », et ce n’est pas un sujet nouveau pour moi.
Si Kevin a ressenti le besoin d’aborder le problème de cette manière, à ce niveau, on peut en déduire que cela indique un changement d’humeur au sein du reste du monde évangélique. Je crois que cet article de Kevin nous offre en fait une merveilleuse opportunité de régler certaines choses.
Voici le cœur de sa préoccupation :
« Ma plus grande préoccupation, ce sont les effets spirituels à long terme que pourraient engendrer l’admiration et l’imitation de l’ambiance qui règne à Moscow, (NDT: le fameux Moscow Mood). Car l’ambiance qui attire les gens à Moscow est trop souvent incompatible avec la vertu chrétienne, manque de considération envers les autres chrétiens et, finalement, est incompatible avec les objectifs déclarés du projet de Wilson… ce avec quoi vous les attirez, c’est ce avec quoi vous les gardez. »
– KDY, TAIQ
Voilà donc l’accusation, et voilà les réponses toutes simples que j’ai à offrir.
Court terme, long terme
Quels sont les fruits à court terme selon Kevin?
« Il offre au monde et à l’Église un christianisme sensé, musclé et direct à une époque de compromis et de défection. En plus de cela, Wilson a une famille qui l’aime et qui aime Christ. »
– KDY, TAIQ
C’est précisément le genre de chose que recherchent tant de familles chrétiennes aujourd’hui: une foi franche, sans compromis, offerte au monde par des familles unies dans leur amour pour Christ et leur amour les uns pour les autres. N’est-ce pas le genre de chose par laquelle Jésus a dit de juger (Matt. 7.20) ? Le fait que Kevin concède cela a rendu sa critique beaucoup plus forte, comme je l’ai noté ci-dessus, mais seulement en surface.
En effet, si vous prenez la concession au sérieux, vous réalisez qu’elle invalide la critique elle-même. Si ce qu’il a concédé semble finalement être un argument favorable pour Moscow, quel est donc l’inconvénient? L’inconvénient, c’est qu’imiter un état d’esprit incompatible avec la vertu chrétienne pourrait avoir des effets néfastes à long terme. À long terme? Vous pouvez voir tous ces bons fruits maintenant, mais qu’en est-il d’un moment futur indéterminé où ces fruits ne seraient plus là ? Eh bien, quand un bon fruit se gâte, vous devriez le signaler. En attendant, ne prédisez pas les mauvaises choses qui pourraient arriver dans un nombre x d’années et allez n’allez pas enterrer votre seul talent dans une serviette au cas où quelque chose tournerait mal.
Par exemple, il fut un temps où la Gospel Coalition produisait beaucoup plus de bons fruits qu’aujourd’hui, mais c’était avant de tomber en amour avec Taylor Swift. Les temps changent et les critiques aussi. Eh bien, si un moment arrive où je ne présente plus une foi chrétienne franche à une époque de compromis, et que ma famille n’aime plus Christ et ne m’aime plus, alors j’espère que quelqu’un le signalera.
Le piège de la mondanité
« Je crains qu’une grande partie de l’attrait de Moscow ne soit un appel à ce qu’il y a de mondain en nous. »
– KDY, TAIQ
Attends une seconde. Qu’est-ce que la mondanité? Être mondain, c’est avoir un profond désir d’être respecté du monde. Kevin pense-t-il vraiment que c’est ce que je recherche? Que j’essaie de faire en sorte que le monde m’aime? Qu’il me respecte? La seule façon pour les gens comme moi de devenir respectables, c’est de mourir et de se faire enterrer, six pieds sous terre. Et si jamais ça arrivait, ça ne me monterait pas à la tête parce que je serai au paradis et j’aurai de meilleures choses à penser.
« Comment pouvez-vous croire, vous qui tirez votre gloire les uns des autres, et qui ne cherchez point la gloire qui vient de Dieu seul? »
Jean 5:44 (LSG)
Ainsi, le monde ne loue les chrétiens que dans une mesure très limitée, et il se fait un plaisir de les blâmer pour toutes sortes de choses. Cette envie d’être respecté, c’est comme avoir un énorme volant dans le dos, juste entre les omoplates. Les sages de ce monde n’hésiteront jamais à s’en servir.
Celui qui désire être approuvé par Dieu place la norme dans le texte de l’Écriture (2 Tim. 2.15). Le désir d’être trouvé séduisant par le monde place la norme entièrement entre les mains du Serpent Ancien. C’est lui qui détermine désormais si vous êtes séduisant ou non. Allez plus loin… non, non, vers la gauche.
Voici comment la mondanité est diagnostiquée dans Tactiques du Diable
« Il ne tardera sans doute pas à se rendre compte que sa foi est en flagrante contradiction avec les postulats sur lesquels sont fondés tous les arguments de ses nouveaux amis. Je ne pense pas que cela ait une grande importance, à condition que tu arrives à le persuader de remettre à plus tard tout aveu explicite de cet état de fait. Tu y parviendras facilement grâce à sa vanité, à son orgueil, à sa fausse honte et à sa réserve. Tant qu’il ne fera pas cette mise au point, il sera dans une position fausse. Il gardera le silence quand il faudrait parler, et il rira quand il faudrait se taire.
Tactiques du Diable p. 51-52
En revanche, mon désir, face à la folie rebelle et insensée du monde, est de parler quand je dois, et de rire quand on me l’interdit.
Il est possible que ça tourne mal – parce que nous vivons dans un monde déchu, mais notre tentation, ici à Moscow, c’est de ne pas trop nous soucier de ce que vendent les marchands de respectabilité en cette saison. Trop de dirigeants chrétiens croient que notre témoignage dépend de notre volonté de racheter la collection d’automne. Au printemps prochain, ce sera la collection du printemps. Nos tentations, ici à Moscow, sont ailleurs. Je vous dirais bien quelles sont ces tentations, mais certaines personnes ne tarderaient pas à retourner ça contre nous.
La tentation de rechercher la respectabilité mondaine est cependant répandue dans le monde évangélique. De vastes sections de l’establishment évangélique ont cédé devant cette tentation séduisante, comme l’herbe sèche des prés devant une faux aiguisée. Cet article de Kevin en est un merveilleux exemple. Il ne va pas perdre de points de respectabilité auprès des jeunes à cause de ça, n’est-ce pas ?
Les subtiles manœuvres de la catholicité
« La stratégie consiste non pas à se lier avec d’autres réseaux, mais à frapper fort et à frapper souvent, tout en forgeant une loyauté inébranlable envers celui qui est perçu comme l’Étranger-Perturbateur. »
– KDY, TAIQ
Maintenant, pour parler franchement – ce dont je suppose que j’ai besoin à ce stade – ça vaut de l’or.
Je suis un fondamentaliste, dans le sens où je crois aux fondamentaux, de tout mon cœur. Mais je ne suis pas un fondamentaliste culturel, ni un schismatique ou un séparatiste. Si on m’invitait à prendre part à une conférence, je ne refuserais pas d’y aller pour de simples différences doctrinales. Je le ferais avec joie. Non seulement je le ferais avec joie, mais quand on m’invite quelque part et que rien ne m’empêche d’y aller, je me comporte vraiment bien. Je me comporte comme un gentleman. Si on m’invitait au grand banquet évangélique (cela n’arrivera pas, ne vous inquiétez pas), je ne jetterais pas mon petit pain au serveur ainsi que toutes les coupes de champagne. Je ne me moquerais pas non plus de mes hôtes. Pour une raison curieuse, certaines personnes ont supposé que si je suis prêt à frapper l’infidélité sous la cinquième côte, je serais prêt à faire de même dans mon discours d’ouverture avec à peu près n’importe qui, y compris la femme du pasteur organisateur. Cette hypothèse rend les gens nerveux.
De plus, il m’arrive d’être invité à prendre la parole quelque part, pour être ensuite désinvité après qu’on ait fait passer les organisateurs par les grésillons œcuméniques. Je ne peux donc plus y aller. Oui, ça arrive. C’est arrivé assez souvent, en fait. Lorsque nous invitons un orateur ici à Moscow et qu’il accepte de venir, s’il se trouve quelque part sur l’orbite de Big Eva11, on ne prend rien pour acquis avant qu’il n’ait lui aussi passé par les grésillons. En effet, il est fort possible qu’ils se retirent après avoir accepté de venir, comme l’a fait Karen Swallow Prior. Nous avons invité plusieurs personnes du milieu évangélique réformé, mais la plupart d’entre eux venaient de se marier et avaient acheté cinq paires de bœufs (Luc 14.19-20).
Dans le même ordre d’idée, Kevin se plaint du coup que j’ai porté à l’ERLC et au G3.
« Il s’en prend à la Ethics and Religious Liberty Commission et à la G3 Conference, deux groupes baptistes conservateurs. On pourrait même dire que ces groupes seraient du même côté que Wilson dans presque toutes les batailles culturelles importantes. »
– KDY, TAIQ
En ce qui concerne la ERLC, ce n’est tout simplement pas vrai. L’inclinaison de plus en plus progressiste de l’ERLC a fait l’objet d’une controverse publique au sein de la Southern Baptist Convention, et le fait que Kevin ne se rende pas compte jusqu’où ils ont dérivé à gauche sur un certain nombre de questions est en soi un indicateur de la gravité de la situation.
G3 est certainement un groupe conservateur, mais qui nous ramène au thème de cette section, c’est-à-dire la catholicité versus celui qui tient à garder ses distances. CrossPolitic a été invité à participer à une conférence G3 il y a quelques années, mais on leur a ensuite dit qu’ils ne pouvaient pas m’avoir comme invité dans leur émission pendant leur séjour. J’aurais été heureux de participer et de m’associer à G3. Ce n’était pas réciproque. Kevin devrait peut-être réprimander G3, en leur disant que Wilson est un conservateur et qu’il serait à leurs côtés dans « presque toutes les batailles culturelles importantes ». Voyez si cela fonctionne.
Écoutez-moi bien. Nous savons tout des pressions qui sont exercées sur les gens pour les empêcher d’avoir quoi que ce soit à voir avec nous. Nous savons. Nous y étions. Et sachez que cela ne nous fait pas un pli. Nous avons appris il y a longtemps comment enfiler nos pantalons de grand garçon. Mais que Kevin vienne dire que c’est nous qui sommes pointilleux sur les personnes avec qui nous nous associons… et bien… d’accord, cela ne me fait pas un pli non plus, même si ça aurait probablement dû.
Kevin devrait vraiment savoir à quel point nous sommes disposés à nous associer des personnes qui se trouvent en dehors de notre bulle. Nous l’avons certainement invité à plusieurs reprises à venir travailler avec nous. Kevin fait du bon travail et nous le soutenons. J’ai été heureux de lire ses articles. Nous serions disposés à travailler avec lui malgré le fait qu’il y ait avec lui des hommes au conseil du TGC que nous pensons gravement compromis. Mais si Kevin devait un jour accepter une invitation de notre part, pensez-vous qu’il subirait une pression féroce de leur part? On pourrait s’amuser à pousser la réflexion plus loin, mais nous connaissons déjà la réponse. Bref, ce n’est pas nous qui nous pensons « meilleurs que les autres ».
Une plume équilibrée
Kevin croit que je suis capable d’écrire des choses bonnes, saines et équilibrées, mais que pour une raison quelconque, je ne veux tout simplement pas le faire. Il souligne ce qu’il considère comme les cas relativement rares où j’ai laissé transparaître mes capacités dans ce domaine, comme dans mes aimables commentaires après la mort de Rachel Held Evans. Kevin se demande pourquoi je ne pourrais pas faire plus de ce genre de choses.
C’est bien la première fois qu’on me fait cette critique: quelqu’un veut que j’écrive plus de choses. Je dis aux gens que j’écris pour la même raison que les chiens aboient, et généralement les chiens qui aboient ne sont pas encouragés à intensifier leur comportement.
Kevin se demande où il pourrait trouver…
« un mois de messages sur la beauté du Christ, ou la puissance de la prière, ou les subtilités de la sotériologie réformée, ou les merveilles de la croix, ou la fiabilité totale de la Bible, ou la sotériologie, ou la sainteté de Dieu, ou les glorieuses subtilités de la théologie trinitaire. »
– KDY, TAIQ
Un peu plus loin, il ajoute quelques suggestions sur ma pile de « choses à faire ».
« Le personnage en ligne de Wilson ne consiste pas à présenter les croyances et les confessions réformées, ni à expliquer les livres de la Bible, ni à parler de mission mondiale dans les régions les plus reculées de la terre, ni à parler de liturgie, de prédication, de prière et des moyens de grâce. Je suis sûr que Wilson se soucie de toutes ces choses… »
– KDY, TAIQ
Oui, je me soucie de toutes ces choses. Mais je fais bien plus que me soucier d’eux. J’ai écrit un livre sur environ les trois quarts d’entre eux.
Et je déteste vraiment parler comme ça, mais tu m’y as poussé, man (2 Cor. 11.16). Je crois qu’avec les seuls livres qui me viennent à l’esprit, je peux mettre assez rapidement de côté cette préoccupation : « le pouvoir de la prière », « les subtilités de la sotériologie réformée », « les merveilles de la croix », « la fiabilité de la Bible », « la sotériologie », « l’introduction des croyances et des confessions réformées », « l’explication des livres de la Bible », « la mission mondiale jusqu’aux extrémités de la terre », la « liturgie » et « les glorieuses subtilités de la théologie trinitaire » (pour cette dernière, j’ai rédigé le brouillon). Et sur les sujets restants pour lesquels aucun livre n’est encore imprimé, il y a de fortes chances que quelque chose soit en cours. Donne-moi une minute, d’accord?
Le point soulevé par Kevin, c’est ce que j’appelle le phénomène de la Caverne d’Adullam. À l’époque, nous avons publié un magazine pendant une vingtaine d’années (Credenda/Agenda). Il s’agissait d’une quarantaine de pages d’enseignement sur la famille, la vie d’Église, la magistrature civile, l’eschatologie, etc. Près de la fin se trouvait une page intitulée La Caverne d’Adullam. Elle était consacrée à se moquer des idées absurdes qui dominent notre époque. Nous faisions aussi occasionnellement des plaisanteries dans l’en-tête ou dans un éditorial, mais dans l’ensemble, la majeure partie du magazine était bien habillée et dans son bon sens. Supposons que les gens prennent le magazine, se tournent immédiatement vers la Caverne, le lisent avec un ou deux rires coupables, passent le reste de la soirée à être tiraillés par leur conscience, puis nous écrivent une lettre à propos de leurs préoccupations sur nos habitudes d’écriture alors qu’ils devraient se préoccuper davantage de leurs habitudes de lecture. C’est ce qu’on appelle lire les moqueries et ignorer le reste. C’est ce qu’on appelle retirer tous les morceaux de bacon de la salade, puis se plaindre du manque de vert.
Le point que Kevin a essayé de faire valoir est tout simplement ridicule. Existe-t-il un meilleur mot que ridicule pour qualifier une telle bourde? Kevin n’est peut-être pas au courant de la quantité de matériel que nous avons produits (plusieurs livres sur le mariage, les enfants, l’éducation, la vie d’église et la vie dans tous ses aspects). Dans ce cas, il critiquerait un mouvement qu’il ne comprend vraiment pas. Mais s’il est au courant de tout ce matériel et qu’il a choisi de ne pas le reconnaître dans le but de marquer un point facile, alors sa critique est fallacieuse.
Notre slogan, c’est « Christ dans tous les aspects de la vie » et non « On se moque de tous les aspects de la vie. » Si Christ règne sur tous les aspects de la vie, comme c’est effectivement le cas, alors Il est le Seigneur du sarcasme. Reconnaître ça, c’est se soumettre à la Bible et aux proportions énoncées dans la Bible. Il ne s’agit pas de consacrer le Sarcasme comme Seigneur. Ce serait mal.
Une section très courte
Dans la prochaine section, je vais répondre à l’objection de Kevin à propos du langage que j’utilise parfois, mais je voudrais d’abord établir quelques distinctions importantes. On mélange souvent des choses qui ne devraient pas l’être. J’écris d’une manière particulière. Je pense en métaphores, et chaque fois que j’ouvre le robinet, ce qui sort, c’est ce qu’il y avait dans les tuyaux. On ne doit pas confondre les métaphores jaune vif ou les comparaisons incarnadines avec la moquerie. Écrire d’une manière intéressante, ce n’est pas la même chose que le sarcasme.
Je sais très bien comment utiliser la satire, c’est juste que je ne le fais pas aussi souvent que certaines personnes le pensent.
Les jurons et le Tu Quoque
Il existe une erreur de logique appelée Tu Quoque. C’est du latin pour « ah ouais? Eh bien, tu le fais toi aussi. » Un homme accusé d’avoir volé quelque chose ne peut pas se défendre simplement en affirmant que son accusateur a également volé quelque chose. C’est une erreur de détournement, une tentative de changer de sujet. Vous avez volé? Alors vous êtes un voleur, peu importe si d’autres personnes appartiennent à la même catégorie.
Kevin est membre du conseil de The Gospel Coalition. Lorsque je dénonce la norme de langage fixée par la TGC en matière de critiques de films, je dois expliquer en quoi ce n’est pas le Tu Quoque en action. Il s’agit plutôt d’une simple incohérence soulignée dans le lien vers le tweet de Tom Buck ci-dessus. Le Tu Quoque se produit lorsqu’on reconnaît que les deux parties font la même chose: toutes deux volent, comme dans l’exemple ci-dessus.
Mais quand je mets un peu de sauce piquante dans mon langage, c’est une sauce bien différente de celle recommandée par plusieurs critiques de films du TGC. Ce dont je suis accusé, je ne le fais pas, et ce que l’accusateur tente de me lancer, c’est l’accusateur qui le fait. Et donc, le fait que je sois celui qui le souligne n’est pas du tout une erreur de distraction.
Cela revient à reconnaître une vérité biblique fondamentale.
« Car on vous jugera du même jugement dont vous jugez; et l’on vous mesurera de la même mesure dont vous mesurez. »
Matthieu 7.2
« Et penses-tu, ô homme, qui juges ceux qui commettent de telles choses, et qui les commet, que tu échapperas au jugement de Dieu ? »
Romains 2.3
« Frères, si un homme a été surpris en quelque faute, vous qui êtes spirituels, rédressez-le dans un esprit de douceur. Prends garde à toi-même, de peur que tu ne sois aussi tentés. »
Galates 6.1
Selon moi, ce que révèle ce point, c’est que les objections à mon langage ont plus à voir avec la destination de ce langage qu’avec la présence ou l’absence de certains mots. Kevin et ceux de son entourage n’ont pas de problème à être associés à certains mots. Ils sont très à l’aise avec cette association. Ils recommandent même aux chrétiens d’aller voir des films qui en sont remplis. Mais ils sont moins à l’aise quand ce genre de langage est utilisé par un chrétien contre les péchés de notre époque.
Juste avant d’écrire ce paragraphe, j’ai relu le fameux article où j’utilisais un mot vulgaire. Je serais prêt à en réécrire chaque syllabe aujourd’hui, parce que c’était la bonne chose à faire. Cet article était rempli d’arguments, mais il contenait un mot dur. Tout le monde s’offusque et pointe du doigt le mot parce qu’il pense pouvoir marquer des points facilement de cette façon. Ils refusent de répondre aux arguments. Ils savent qu’ils ne peuvent pas répondre. Personne ne répond aux arguments.
C’est surprenant et inattendu, mais je suis d’accord avec Paul Tripp sur le fait que de telles choses devraient être évaluées sur la base du contexte et de l’intention.
Et c’est pourquoi je dirais que Kevin et Justin Taylor sont simplement hypocrites. Je ne parle pas de damnés hypocrites, comme les Pharisiens dans Matthieu 23. Mais ils sont manifestement hypocrites, comme Pierre et Barnabas l’étaient à Antioche – des hommes bons faisant de mauvaises choses. Ils devraient vraiment arrêter de l’être.
Vous approuvez les critiques de cinéma qui trouvent des thèmes évangéliques dans un film profane contenant plus d’une centaine de jurons, mais vous ne pouvez pas trouver de thèmes évangéliques dans un article de blogue contenant un évangile clair parce qu’il n’y avait qu’un mot grossier. Ce mot visait pourtant le cœur d’un péché particulier pour lequel le sang du Christ apporterait le véritable pardon.
Cela revient à dire que le chameau est disparu et que nous ne parvenons toujours pas à trouver le moucheron.
Sachez simplement que dans certains de mes articles les plus percutants, j’ai toujours pris soin de conclure par une présentation de l’évangile. Ce n’est pas le fruit du hasard, je suis un ministre de cet évangile. Si vous ne parvenez pas à trouver les thèmes évangéliques dans ce genre de présentation, mais que vous pouvez les trouver dans une tournée de Taylor Swift, alors quelque chose ne tourne vraiment pas rond.
Pour ceux qui viennent de nous rejoindre, cette question de langage. Mon article le plus récent à ce sujet peut être trouvé ici, et il contient de nombreux liens que vous pourrez suivre, si vous désirez en avoir plus pour votre argent.
Gardez ce principe à l’esprit: l’apôtre Paul a dit que nous devions avoir un discours gracieux, assaisonné occasionnellement de piment fort (Col. 4.6). Dans ma cuisine, au fil de millions de mots, j’en ai parfois mis un fort, c’est vrai. Je l’ai fait délibérément, en cherchant à être obéissant et attentif au contexte. J’ai porté une grande attention pour déterminer de quel type de plat il était question. La façon dont j’utilise le piment fort n’est pas un péché – je ne dis pas qu’il est acceptable de pécher si vous respectez la bonne quantité. Je dis que ce n’est pas un péché s’il est utilisé de manière juste.
Kevin et Justin Taylor ont donc rassemblé tous ces piments, ils les ont broyés en une pâte amalgame qu’ils ont étendue sur un biscuit Ritz. Ils ont servi ce biscuit à votre sainte tante Millie dans l’espoir qu’elle sera scandalisée et arrêtera d’écouter le podcast de Nancy.
Ce n’est pas la bonne façon de faire.
Une période de questions nécessaire
Juste au début de l’article de Kevin, il dit ceci :
« Je ne cherche pas à me lancer dans un long débat avec Wilson ou ses partisans. »
– KDY, TAIQ
Je suis navré de devoir expliquer ça, mais ce n’est pas comme ça que ça marche.
On ne peut pas lancer une critique comme ça, destinée à faire réfléchir beaucoup de gens de bonne volonté sur leur attirance pour le Moscow mood, et refuser ensuite avec éclat de répondre aux questions ou d’être trop occupé pour tenir compte des répliques. On ne peut pas lancer une attaque et demander ensuite un cessez-le-feu.
C’est particulièrement le cas lorsque ta critique a échoué lamentablement. S’il n’y avait pas de réponses possibles et que nous, défenseurs du Moscow mood, restions tous honteusement assis à notre place, tu pourrais facilement te permettre de répondre à des questions, car en fait, il n’y en aurait pas. Mais s’il s’avère que la critique est un échec, et qu’il y a par conséquent une foule de questions, dont beaucoup seraient très difficiles à répondre pour Kevin, on ne peut pas simplement dire que cela « prendrait beaucoup de temps ». Ça prend beaucoup de temps, en effet. Ça prend aussi notre temps. Pourquoi as-tu commencé ça alors?
La raison pour laquelle nous avons commencé est que le monde de Big Eva commence à voir des « défections » importantes et cela les préoccupe beaucoup. Ils les considèrent comme des défections ; nous les appelons simplement des réaffectations. Il y a les « défections » de la base, et il y a les « défections » très médiatisées comme Jared et Joe. Mais dans ce climat, je ne peux pas imaginer que quiconque était déjà attiré par le Moscow Mood soit ralenti d’une manière ou d’une autre par l’article de Kevin. Les réactions que j’ai vues en ligne le confirment.
Nous avons déjà eu des critiques comme celle-ci, mais le soutien à la suite de celle-ci, sur les réseaux sociaux, a été nettement plus solide que ce qui se produit habituellement. Après que Kevin ait publié son article et après que Justin l’ait retweeté pour le soutenir, une foule s’est naturellement rassemblée. Et cette fois-ci, la foule avait beaucoup de choses pertinentes et perspicaces à dire.
En plus de tout cela, beaucoup de ceux qui auraient aimé que l’article de Kevin soit dévastateur pour nous s’en plaignent – de la même manière que les fans ardents d’une équipe de football se plaignent de leur propre entraîneur après une défaite.
Je crois donc que les questions soulevées dans les articles que j’ai listés plus haut nécessitent des réponses. Je crois que les questions tout à fait raisonnables que j’ai soulevées tout au long de cet article nécessitent des réponses. Répondre par écrit serait bien, mais je pense que de se voir en personne serait de loin préférable. Uri Brito, ministre président du CREC, a proposé de s’occuper d’un tel événement, et je serais ravi d’y participer. Uri serait un fidèle modérateur.
Si de telles conditions semblent trop jouer en ma faveur, j’accepterais certainement un événement comme la Soirée d’Eschatologie, présidée par un modérateur choisi par Kevin, où je discuterais de ces questions avec Kevin et deux autres hommes de sa conviction, et aussi de son choix. Je serais heureux d’être en infériorité numérique et sans aucun avantage sur le terrain. Je me présenterais à l’heure au lieu désigné et je serais heureux de passer le contrôle de sécurité. Tu sais… ces détecteurs de métaphores. Je porterais une chemise propre. Et une cravate.
Et ce n’est pas un hasard si ce dernier point rejoint celui que j’ai évoqué plus tôt à propos de qui garde ses distances avec qui. Nous sommes bien plus disposés à fréquenter nos frères qu’ils ne semblent l’être. Quoi qu’il en soit, l’invitation est lancée, on attend la réponse.
P.S.
Kevin a également commenté un « gros plan à la Clint Eastwood de Wilson fumant un énorme cigare… » Ce n’était pas un énorme cigare. C’était un cigare normal, tout simple.
En conclusion
Je ne tiens pas à rallonger davantage cet article. Cette dernière section contient simplement le résumé de mes principaux arguments, une phrase pour chaque grande section. Kevin a travaillé dur pour être impartial, mais il était si impartial que ça a dilué la force de sa critique. La mondanité est une soif de respectabilité, qui est bien plus évidente dans les cercles de Kevin que dans le mien. Être isolé, rejeté et évité n’est pas la même chose qu’être un solitaire par choix. Ceux qui aiment notre mouvement apprécient toute l’ampleur de ce que représente le mouvement, tandis que ceux qui se concentrent sur ce qu’ils ont surnommé mon « personnage en ligne » incendiaire sont ceux qui font preuve d’une vision tunnel. Mettre du piment dans ses articles n’est pas la même chose que jurer. La véritable objection à ma plume incisive concerne la cible de mes propos, et non les propos eux-mêmes. En effet, il existe toutes sortes de preuves que les mots eux-mêmes sont corrects pour Kevin et ses amis, tant qu’ils ne ciblent pas les péchés de notre époque. Kevin a désormais l’obligation morale de s’entretenir avec nous sur ce sujet et de nous aider à résoudre la dispute.
J’aimerais vraiment ça.
Article original de Douglas Wilson. Traduction: Le Théologue.
NOTES
- N.d.T. Big Eva fait référence au très large réseau d’organismes et de conférences cherchant à influencer la façon de faire et les stratégies des églises évangéliques Américaines. ↩︎
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